À quand remontait la dernière fois que le stellarois s'était aventuré dans l'un des territoires de la Congrégation de l'Ombre et notamment au sein des ruines de Fata-Morgana ?
Peut-être en solitaire, mais ça ne l'avait pas marqué plus que ça. Pourtant, en y réfléchissant un peu, ces lieux étaient un parfait sujet d'étude pour lui et ses questionnements. Curieusement, ça ne lui était pas venu à l'idée. Ni même lorsqu'il avait « voyagé ». Après tout, ses excursions avaient été plus nombreuses au nord qu'ailleurs en Dùralas, mais ce n'était pas le sujet.
Dougal fit glisser le bout de ses doigts sur la paroi des traces d'un pilier détruit et n'en récolta qu'un mélange de cendres et de poussières.
Bien qu'une couche noirâtre s'était déposée sur son gant, il n'y avait nulle trace de son passage sur le pilier ; à croire que cette sorte de suie était trop importante et trop encastrée dans ces ruines pour être nettoyée aussi aisément. Ou peut-être était-ce l'œuvre d'une malédiction ? Aucune importance.
C'était curieux à quel point tout se ressemblait, mais tout était relativement différent. C'était à se demander s'il n'y avait pas des miasmes envoûtants et illusoires dans l'atmosphère qui plantaient un décor si perturbant.
Effectivement, je déteste cette partie du monde.
Et cette désolation avait de quoi déprimer et même raviver des blessures profondes.
C'était peut-être pour ces raisons que le rôdeur de la Garde n'avait jamais longtemps traîné dans les parages. Certes, il y avait une histoire à étudier et qui impactait personnellement le gardien, mais ça n'aurait pas eu de sens de passer du temps à un endroit aussi désagréable.
Les heures passèrent et Dougal continua à déambuler entre les vestiges de l'antique cité réduite à néant pour le renouveau d'une "calamité", en tout cas au sens littéral et non pas symbolique. Ce serait pure folie que de s'essayer à comparer Fragor avec le Basilic et Dougal avait suffisamment de problèmes sous le coude pour ne pas se définir en tant qu'ennemi des nagas. Il y en avait déjà une qui devait lui rendre des comptes !
En tout cas, la nuit tombait peu à peu et l'humain devait se trouver un endroit caché pour s'emmitoufler dans sa cape et attendre que le soleil ne revienne ou qu'un événement quelconque ne vienne perturber le calme nocturne. Après tout, de terribles créatures rodaient et un certain nombre devait préférer ces heures sombres plutôt que celles de la journée.
Dougal resta prudent, comme il en avait l'habitude. En tant que rôdeur, c'était son quotidien de rester discret en territoire inconnu et de ne pas dépendre d'un feu, à moins que les températures ne soient trop extrêmes. L'humain se contenta également de plus frugal qu'il pouvait s'offrir : des racines à mâcher et une tisane froide pour apporter quelques douceurs à ce festin rudimentaire. Mais il ne s'en plaignait pas ; il préférait l'austérité à la mort. Dougal avait trop de choses à accomplir pour se le permettre.
Après son repas, le gardien s'immobilisa entièrement, se fondit totalement dans le décor et l'obscurité, puis s'accorda le repos et enchaîna de courts sommes d'une dizaine de minutes à chaque fois, tout en ne dormant que d'un œil. Le rôdeur devait être vigilant et alerte...