Melhyndil étant désormais en route pour Wystéria avec Muninn, il était temps pour Hilda d’enfin préparer la surprise qu’elle lui réservait depuis un moment. En effet, le duo prévoyait, éventuellement, partir dans le Nord afin de se rendre dans le village natal de la jeune femme. Mais les vêtements sylfaniens de l’elfe n'étaient clairement pas adaptés pour le climat froid et rigoureux des Fjords. Alors, l’idée de la nordienne était de lui offrir des vêtements sur mesure et parfait pour ce genre de voyage.
De passage à Kastalinn pour refaire les stocks de sa boutique, Hilda avait choisi les meilleures pièces de cuir, en avait fait deux ballots de taille différente, puis avait quitté son commerce, laissant la gestion à Gunnar, son assistant. Celui-ci, l’ayant vu faire, lui lança juste avant qu’elle ne sorte :
- Alors, c’est pour "ton ami", hein ? Un ami vraiment spécial, je suppose ?
Hilda rougit violemment, balbutiant une excuse inaudible avant de filer. Son premier arrêt fut d’abord chez un cordonnier réputé. Il fallait dire que la völva ne cherchait que le meilleur pour son ami. Elle y commanda une paire de bottes chaudes, à la fois souple et solide, et y laissa le plus petit des lots de cuir.
Cette partie accomplit, la nordienne dirigea ses pas vers une boutique de vêtements. La demi-elfe n’ayant jamais vraiment cherché de couturière avant cela, n’ayant pas eu besoin de nouveaux habits depuis son départ, elle avait demandé à Gunnar quelques conseils sur les commerçants les plus réputés et doués dans cette ville. Celui-ci lui avait parlé de la boutique d’une certaine Mathilda Leifdóttir, la Toile d’or, là où elle venait de mettre les pieds. Son regard fut de suite captivé par les étoffes, les capes et toutes les marchandises affichées en vérité. Tout semblait à la fois solide et magnifique. Ce n’est que lorsqu’une adolescente rousse lui adressa la parole en nordien qu’Hilda revint à la réalité.
- Puis-je vous aider, madame ?
- Oh, bonjour. Serait-il possible de parler à ta patronne ? J’aimerais passer une commande, hum, particulière.
- Oui, bien sûr, je vais la chercher.
La rouquine revint quelques minutes plus tard avec une dame dans la quarantaine, sa mère visiblement au vu de son apparence.
- Bonjour, je suis Mathilda Leifdóttir. Solveig me dit que vous aviez une commande à passer ?
- Oui, c’est ça.
La nordienne déposa le ballot de cuir restant, bien fourni, et une énorme bourse de pièces d’or.
- Je souhaite partir en voyage dans le Nord avec un ami, mais celui-ci ayant grandi à Sylfaën, et bien, disons qu’il ne connaît pas la rigueur du climat de nos terres.
- Et bien, votre ami peut se compter chanceux que vous pensiez à cela pour lui.
La marchande eut le sourire en voyant les joues rougissantes de la jeune femme. Visiblement, elle avait un don pour déceler les détails cachés. Le duo de nordiennes passa l’heure suivante à discuter de la commande, la demi-elfe indiquant au mieux la taille et la morphologie de l’elfe afin que les vêtements soient ajustés à la perfection. Elle commanda ainsi trois tuniques, trois pantalons, deux paires de gants et une cape de fourrure.
- Vous désirez une couleur particulière pour les tuniques ?
- Vert. Dans les teintes forestières, voir émeraude à la rigueur.
La völva avait lancé cela sans hésiter, faisant à nouveau sourire Mathilda. Cette teinte, si proche des forêts de Sylfaën, lui irait à merveille. La völva se surprit à espérer que le choix plairait à Melhyndil autant qu’elle l’imaginait. Il fut ensuite convenu d’un délai de deux semaines pour que la commande soit accomplie. Et Hilda promit bien entendu de se pointer dans quatorze jours très exactement.
***
Deux semaines s’écoulèrent donc. La nordienne commença par récupérer les bottes. Elles étaient exactement comme la jeune femme le désirait. Hilda remercia le cordonnier et le félicita pour son travail, avant de diriger ses pas chez la couturière. L’adolescente l'accueille avant de la conduire à l’atelier, où sa mère peaufinait les finitions. La völva resta bouche bée devant le travail accompli. Les vêtements avaient été fabriqués avec une laine douce et soyeuse au toucher. Deux des tuniques avaient des teintes vert forêt, tandis que la dernière tendait vers l’émeraude. Les trois possédaient des bandes noires brodées d’or au col, au bas et aux poignets illustrant des motifs végétaux au lieu des traditionnels symboles nordiens. Les pantalons de laine aux teintes terreuses convenaient à la perfection également, restant simples et sans fioritures. Les gants, tout aussi souples et solides que la paire de bottes, permettraient à l’archer de tirer avec son arc sans soucis, en plus de lui éviter les engelures.
Mais la cape était définitivement la pièce maîtresse. Le cuir de la section extérieure luisait sous la lumière des lanternes de l’atelier, prouvant que le vêtement avait reçu un traitement d’huile afin de le rendre étanche à la neige et à la pluie. Le col et l’intérieur étaient doublés d’une fourrure beige-orangé qui tiendrait par ailleurs Melhyndil bien au chaud.
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Je vois que vous admirez mon travail.Mathilda venait d’entrer dans sa salle de travail, une ceinture et un petit sac accrochable à la taille par des ganses à la main.
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C’est … c’est magnifique, oui. Vous avez un réel talent.La dame la remercia avant de lui tendre ce qu'elle avait en main.
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Il restait un peu de cuir avec ce que vous aviez fourni, j’ai donc fabriqué tout ça en prime. C’est cadeau, je ne demanderais pas de pièces d’or supplémentaire.La marchande s’approcha de la cape.
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Aussi, si jamais votre voyage se prolonge en été, ou simplement si vous retournez dans le sud, la doublure en fourrure se retire. Je vais vous montrer.Et comme de raison, en défaisant quelques sangles nouées, l’intérieur en fourrure se séparait de la cape en elle-même, ne laissant que le col et le cuir étanche.
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C’est parfait.La demi-elfe remercia une dernière fois la couturière puis quitta la boutique, heureuse de cette commande si admirablement bien réalisée. De retour à son propre commerce, la jeune femme plaça le tout soigneusement dans un coffre de bois. Avec ce chargement, la nordienne n’eut d’autre choix que de voyager avec un groupe marchand pour rentrer à l’Institut, point de retrouvaille pour leur duo lorsque l’elfe et son corbeau reviendraient enfin de Wystéria. La demi-elfe se demandait d’ailleurs où il se trouvait à cet instant, peut-être en plein cœur des forêts mystérieuses de Wystéria, accompagné de Muninn. L’idée qu’ils puissent être en train de vivre une aventure fascinante la fit sourire. Tout ce qu’elle espérait, c’était que les vêtements seraient à la bonne taille et plairait à son ami. Mais ça, il lui faudrait attendre quelques semaines pour le savoir.