Il faisait encore sombre lorsque la silhouette d’Edrahil traversa le sous-bois qui le séparait de l’immense forêt de Sylfaën. Plus qu’une journée de marche et il aurait atteint l’extérieur du royaume des elfes. La liberté, le droit à une seconde chance ? Pas exactement. Plutôt la possibilité d’accomplir de biens sombres objectifs à l’abri des regards lourds de sens de ses parents. Alors voilà, l’elfe noir quittait la clairière et s’enfonçait entre les arbres à l’écorce noueuse qui semblaient murmurer sur son passage. Les branches se pliaient selon le vent, grinçant, gémissant, faisant trembler les feuilles fébrilement accrochées à leurs extrémités. Et au fond de l’horizon le soleil se levait tranquillement, zébré par les troncs fièrement ancrés dans le sol. Edrahil s’arrêta pour contempler cette forêt qui ne serait bientôt plus qu’un lointain souvenir. Il profita de cette pause pour repérer du gibier afin de tenir jusqu’à la prochaine ville qu’il trouverait sur sa route. Il ne lui restait plus beaucoup de pièces, mais ce serait suffisant pour acheter quelques vivres. En attendant, il lui faudrait assez de viande pour traverser Sylfaën ainsi que les plaines d’Aràn le séparant de la capitale Kastalinn. Quelques baies devraient aider à compléter son régime alimentaire.

Le brun encapuchonné s’accroupit près d’un buisson pour relever quelques empreintes de proie facile et suivit une petite piste jusqu’à ce qu’un détail l’interpelle. Des traces de pas traversaient au milieu de cette même piste. Les pieds semblaient trop petits pour être ceux d’un elfe et trop fins pour être ceux d’un nain. Il ne pouvait s’agir que d’un humain. Alors il n’était pas seul dans cette partie de la forêt ? Les traînées semblaient assez fraîches en plus. Il fronça les sourcils et se remit en quête de gibier, bien plus sur ses gardes qu’il ne l’était déjà. D’ailleurs, il était tellement méfiant à l’idée de croiser la route de quelqu’un qu’il finit par armer une flèche sur son arc fraîchement acquis. Il ouvrait bien les yeux et guettait tous les sons qui parvenaient jusqu’à ses sensibles tympans. Il avait même relevé sa capuche pour avoir le plus de visibilité possible. Mais il était prêt à l’enfoncer de nouveau sur son crâne si jamais quelqu’un se montrait à lui. Hors de question de laisser voir son visage, encore moins dans un endroit aussi proche de la capitale des elfes.

Cela faisait longtemps que notre valeureux héros marchait, par delà le froid d’hiver et contre des vents de tempêtes déchainés.

-Pas la peine d’en faire trop, narrateur, je marche depuis dix minutes et il ne fait pas si froid.

Laisse-moi donc faire mon boulot, héros de pacotille. Je disais donc que contre toute
attente, notre valeureux héros marchait avec beau temps, une légère brise parcourait son visage et effleurait ses maigres joues qui n’avaient rien avalé depuis fort longtemps.

-Quoi ? Mais je viens de manger pleins de baies, et…

Bref. Le vaillant Excelsior marchait.

-Quoi, c’est tout ?

Il marchait, il marchait, alors que le soleil venait à peine de se lever. Lui qui avait déjà l’habitude de se lever à des heures d’une matinalité avoisinant la mi-journée, il avait eu l’envie irrépressible de reprendre son voyage sur un lever de soleil.
Envie qui n’avait d’ailleurs aucun lien, par ailleurs, avec son réveil en sursaut dû à une attaque d’écureuils incroyablement hargneux armés de glands, qui, malgré leur taille, s’avéraient dangereux. La forêt lui semblait inhospitalière, même à lui, qui pourtant avait l’habitude de s’aventurer dans les plus dangereuses grottes et les plus sombres dangereux. Il lui arrivait même d’avoir des frissons, lorsqu’une volée de moineaux décollait d’un arbre proche ou qu’une monstrueuse sauterelle lui coupait devant. Il avait même, virilement bien entendu, hurlé lorsqu’il avait aperçu un daim au loin. Cette forêt semblait véritablement démoniaque, ou peut-être hantée. En tant que héros, il se promit de faire, s’il avait le temps, quelque chose à ce sujet. Mais il était pressé…

-Ah bon ?

Oui.

-Ah bon.

Il décida pourtant, car la fatigue de sa courte nuit d’une dizaine d’heure et de sa trentaine de minutes de marche le tenaillait, de s’allonger contre un arbre qui semblait plutôt vieux au milieu d’une clairière un peu plus lumineuse que le reste de la forêt. C’est alors qu’une fatigue pareille à un néant le happa, le laissant sans défense au beau milieu de cette hostile place où la vie était à chaque instant menacée par l’environnement.

Edrahil continua sa progression entre les arbres et finit par baisser son arme au bout d’une demi-heure, les bras un peu engourdis et son angoisse en partie dissipée. Il continuait malgré tout de rester sur ses gardes et d’écouter la forêt à la recherche d’indices pour sa chasse. La piste du gibier qu’il avait suivi en parallèle terminait dans un terrier et il n’avait aucun moyen de faire sortir sa proie. De plus, l’idée d’attendre pendant des heures que l’animal se présente à la sortie de son foyer ne l’enchantait pas vraiment. Il reprit donc sa marche et finit par atteindre une petite clairière tandis que le soleil pointait au zénith.

Il jeta un œil au paysage et tout son corps se raidit lorsque son regard tomba sur une silhouette étendue sous un arbre. Aussitôt, il se saisit de son arc et encocha une flèche qu’il pointa dans la direction de l’homme allongé. Car oui, maintenant il avait la certitude que c’était bien à un humain qui il avait affaire. Sans le moindre bruit, d’un pas aussi léger qu’il lui était permis de faire, il s’approcha de sa cible tout en surveillant ses réactions. L’individu semblait assoupit et donc inoffensif pour le moment. Edrahil tendit la corde de son arc et relâcha la pression pour que la flèche vienne s’enfoncer dans le tronc sur lequel l’homme était adossé. Le projectile déchira l’écorce de l’arbre dans un bruit sourd et net, juste au-dessus de la tête de l’inconnu.

Le grand héros dormait.
Et rêvait.
Avec un noble filet de bave coulant de sa bouche, un air angélique dessiné sur un visage paisible, il rêvait. Un enfant n’aurait pas eu tant d’innocence. Ou presque.
Dans son rêve, il se battait. Sauvait une demoiselle, tel le héros qu’il devait être, combattant des dragons, tel le chevalier qu’il devait être. C’est alors qu’il se prit une flèche en pleine tête.
En rêve.
Ou presque.
La véloce se planta à quelques centimètres au dessus de sa tête, emportant quelques menus morceaux de son incroyable chevelure, pourtant déjà si appauvrie par la calvitie. Il se releva en sursaut, se redressant le plus rapidement qu’il put, trébucha, tomba, se heurta à une pierre, se releva avec l’arcade ensanglantée et tenta de déterminer l’origine de la flèche.
Un elfe se tenait à une dizaine de mètre de lui. Un elfe avec un arc. Hum, ce n’était surement pas lui, il devait y avoir un brigand pas lui.
C’est alors que son incroyable intelligence pris le dessus. C’était un elfe, incroyablement hautain, d’ailleurs, qui se tenait devant lui. Hors, les elfes usaient la plupart du temps de magie pour arriver à leurs fins.
Il en était sûr. Il n’était pas tombé par erreur, en se réveillant. Il était bien trop adroit pour ça. Il s’était probablement fait ensorceler par l’elfe. Et il tenait son arc pour l’inciter à l’erreur, lui faire croire qu’il était seul.
La seule explication était qu’il était beaucoup trop intimidant pour qu’un simple elfe le défie seul. Oui, beaucoup trop intimidant. Il avait probablement un complice dans les parages.

_Eh, toi, l’elfe avec la tête de méchant ! Dit moi où se trouve ton complice, où je n’en répondrais plus de moi !

Dans peu de temps, l’elfe prendrait un air terrifié et s’excuserait. C’est comme ça que ça se passait, dans les histoires héroïques. Et ça tombait bien, lui, Excelsior Crive, était un très, très grand héros !

L'archer observa les réactions de sa victime et se préparait à contre attaquer un éventuel réveil violent. Ce qu'il vit à la place le rendit plutôt perplexe, voire même complètement abasourdi pendant quelques instants. Est-ce que ce qui venait de se produire était sérieux ? Il aurait pu en rire, sincèrement, s'il n'était pas aussi troublé par un tel degré d'incompétence. Ce type venait de lui faire un numéro vraiment grandiose qu'il n'aurait jamais cru voir un jour dans sa vie d'elfe. Il ne le connaissait pas encore, mais il était certain qu'il serait incapable de le prendre au sérieux par la suite. Comment cet homme avait-il pu réussir un tel enchaînement de prouesses en si peu de temps ? Et dire qu'il n'avait tiré qu'une flèche au dessus de sa tête... Edrahil n'osait imaginer s'il l'avait réveillé de façon plus brutale encore !

L'homme en question s'était tourné dans sa direction et le fixait avec un filet de sang dégoulinant de son arcade, lui jetant une menace tellement risible qu'elle acheva de détruire sa crédibilité quasi inexistante auprès d'Edrahil. Secoué par un ricanement sec, l'elfe brun baissa son arc et jeta un regard dédaigneux à son interlocuteur. Il pensait sincèrement qu'il pourrait l'intimider comme ça ? Mais qui était cet homme, franchement ? Peu importe, l'assassin ne comptait pas lui laisser la vie sauve maintenant qu'il avait vu son visage. Il aurait dû penser à remettre sa capuche avant de le réveiller, comme ça il aurait peut-être pu l'épargner. Ou peut-être pas. Il aurait bien trouvé une autre excuse pour se débarrasser de sa présence chez les vivants.

« J'ose espérer que tu n'imagines pas faire peur à quelqu'un après un tel spectacle. » cracha-t-il de façon hautaine avant de répondre indirectement à sa question « Tu as de la chance que je sois la seule personne ici qui puisse rire de toi. »

Edrahil le fixa droit dans les yeux tout en avançant de quelques pas dans sa direction, laissant quand même une certaine marge entre eux. Il tenait son arc fermement dans la paume, prêt à encocher une flèche. Non pas qu'il ait peur de cet homme, mais après sa petite démonstration de maladresse il tenait à garder un minimum de réflexe pour parer à une éventuelle nouvelle gaffe.

Le vaillant Excelsior scrutait son potentiel adversaire de son œil acéré. Il n’avait pas réellement l’air si fort que ça. En tout cas, il avait forcément l’air moins fort que lui, puisqu’il ne possédait évidemment pas le charisme inhérent aux héros de son état. Et il était probablement impressionné par son incroyable résistance à la chute qu’avait provoquée l’elfe. Après tout, un individu lambda serait mort contre la roche agressive qui lui avait heurté l’arcade. L’archer, lui, avait simplement ricané pour masquer sa peur.
A ses paroles, le jeune homme compris que l’elfe était finalement seul. A moins que ce ne soit un piège ? Excelsior choisit de croire que non. Il n’avait pas envie de se compliquer la vie.
En un éclair, il entrevit cette rencontre comme un signe. Voilà longtemps qu’il cherchait à accomplir sa quête. Cette même quête qui l’avait frappé de stupeur alors qu’il réalisait le sens de sa propre vie, dans ce pré où il cueillait des fleurs. Il devait survivre. C’était un signe.
Alors qu’il vit l’elfe resserrer sa prise sur son arc, arme dérisoire face à lui, il recula d’un pas, chercha la lance en travers de son dos quelques secondes et dégaina, se plaçant dans une garde aussi parfaite qu’aléatoire.
Cela faisait longtemps qu’il n’avait pu exercer sa quête. Avec un sourire aussi mystérieux que charismatique et totalement inutile, il fixa son ardent regard de braises tièdes dans celui de l’elfe et attendit.
Un autre combat commençait. Et sa quête ne lui permettrait pas de perdre.

Edrahil: 110
Dégâts: 48
Vitesse: 123

Excelsior: 140
Dégâts: 84
Vitesse: 78

Edrahil commence l'assaut.

Les yeux d'Edrahil se plissèrent lorsqu'il vit son futur adversaire chercher son arme dans son dos. Il s'agissait d'une lance du fantassin comme il en avait vu à la boutique quelques jours plus tôt. Une arme de choix que l'elfe brun avait toujours apprécié voir maniée entre les doigts experts de son oncle. Mais pour être honnête, il n'espérait pas grand chose de la part de l'inconnu. En fait, il se demandait même comment il était possible pour lui d'utiliser ça sans se l'être déjà planté dans sa propre jambe. Après la démonstration de tout à l'heure, il avait vraiment hâte de le voir se ridiculiser d'avantage avec une arme aussi classieuse.

Quoi qu'il en soit, le voir agripper sa lance signifiait qu'il était prêt à se battre. Très bien, Edrahil répondrait en conséquence. Il tendit la corde de son arc et prit l'inconnu en joue, le regard vif et rempli de volonté. Volonté de combattre, volonté de gagner, volonté de détruire quiconque se met sur sa route. Son poignet se détendit alors qu'il relâchait la corde, envoyant une flèche du côté gauche de sa cible mais la ratant volontairement. Aussitôt après, il avait déjà encoché une seconde flèche qu'il tirait cette fois-ci du côté droit de sa victime en espérant ne pas rater son coup et la lui planter dans la chair. C'était une ruse assez évidente qui possédait de maigres chances de réussite, mais cela permettrait au moins à Edrahil de cerner un minimum son adversaire et de connaitre ses capacités et ses réflexes.

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'Attaque - Elfe' :

Le grand héros était en garde. L’elfe avait sorti un arc. Un arc qui semblait d’une facture assez modeste, voire même assez banal, mais qui n’en restait pas moins dangereux. Une flèche est une flèche. Un arc est un arc.
Et une flèche dans les côtes est une flèche dans les côtes.
La première était passée à quelques centimètres de lui. Par un réflexe d’une héroïque lenteur, il l’avait esquivé. Et juste à temps pour qu’une autre se plante dans ses côtes flottantes, lui arrachant une certaine grimace.
La douleur, sensation noble s’il en est une, était forte, mais il y était habitué. En tant que grand héros du peuple, elle n’était qu’un des jalons sur sa quête infinie.
Mais ça piquait quand même un peu. Et la flèche l’entravait pour manier sa lance. Ce n’était pas grave. Il avait un arc. Il ne pourrait que moins bien tirer si Excelsior, avec son étonnant et si original sens de la stratégie, l’acculait contre un arbre.

_J’ai connu des poings d’enfants qui blessaient plus que tes flèches, jeune elfe !

Sans se rendre compte qu’il venait de clamer à son adversaire qu’il se battait régulièrement avec des enfants, il fonça sur son adversaire. Et trébucha sur une racine.
Décidément, cet elfe était capable des pires pièges…
Cependant, dans un ultime réflexe, qui, pour une fois, n’était pas si inférieur à la moyenne humaine, il profita de la chute pour tenter de planter son javelot dans le ventre de l’elfe.
S’il réussissait, le combat prendrait une autre tournure. Et en tant que héros, la chance serait probablement de son côté.
Probablement.

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'Attaque - Humain' :

Edrahil: 26
Dégâts: 48
Vitesse: 123

Excelsior: 92
Dégâts: 84
Vitesse: 78

Edrahil joue au prochain tour

Edrahil était plus que satisfait de voir sa flèche s'enfoncer dans les côtes de son adversaire. Alors sa ruse, aussi banale soit-elle, avait vraiment bien fonctionné et lui avait permis de prendre l'avantage sur l'humain. Il étira un rictus carnassier tandis qu'il écoutait sa faible provocation à laquelle il ne daigna même pas répondre. En temps normal, sa fierté ne l'aurait pas laissé être rabaissé de la sorte, mais il jugea que cet individu ne valait même pas la peine qu'il lui retourne son venin. Lorsqu'il le vit trébucher sur une racine et s'étaler lamentablement sur le sol, ce sentiment ne fut que plus intense encore. Edrahil profita de le voir perdre l'équilibre pour s'élancer dans sa direction avec l'espoir de lui asséner un coup direct à main nue.

Mais la lance de son adversaire en décida autrement. Il n'avait pas prévu, il n'avait pas pensé que l'homme pourrait réagir dans un ultime espoir de prendre le dessus sur la situation. Et cette erreur de jugement provoqua sa perte. Il sentit la lame affûtée de la lance s'enfoncer dans son abdomen et déchirer aussi bien le tissu que sa chair. Son sourire disparut. Ses yeux s'écarquillèrent. Son souffle cessa. Avec une lenteur infinie, il baissa le regard vers l'arme qui brisait ses entrailles et posa ses deux mains tremblantes sur le manche de cette dernière, osant à peine imaginer la douleur de la retirer. En parlant de douleur, celle du coup qu'il venait de prendre finit par pulser dans tout son corps tandis qu'il respirait de nouveau et que ses jambes le lâchaient, le faisant tomber à genoux sur le sol. Il serra la mâchoire aussi fort qu'il le put, sentant comme des décharges envahir son ventre. Fermant les yeux, il empoigna la lance et l'ôta de sa chair d'un coup sec. Un hurlement sourd déchira la clairière pendant une seconde.

Son souffle se coupa de nouveau durant quelques instant et il ouvrit légèrement les yeux pour constater que le sang s'écoulait à flots rapides de sa plaie béante. Il respira lentement, ses mains tremblant toujours, et il jeta aussi loin que possible cette lance criminelle qui lui causait tant de douleur. Hors de portée de son adversaire en tout cas. Il posa ensuite son regard sur l'humain qu'il n'était qu'à moins d'un mètre de lui, toujours au sol. Edrahil avait l'impression qu'une heure s'était écoulée depuis sa faute dramatique. Mais il y'avait tout au plus une ou deux minutes d'écoulées.

Oubliant tant bien que mal la douleur qui le traversait, il se jeta vers son adversaire et le poussa sur le dos pour enfoncer d'avantage la flèche qu'il y avait déjà planté au début de leur lutte. Il tritura le projectile pour le faire souffrir, essayant de creuser d'avantage sa chair, un air des plus malsains sur le visage. C'était à mi-chemin entre un sourire cruel et une grimace d'amertume. La souffrance qui déchirait son abdomen le rendait absolument dingue même s'il ne le laissait qu'à peine paraître. En fait, il se contentait juste d’expulser sa frustration et de se distraire de la douleur en faisant mal à son ennemi. A bout de souffle, il finit d'ailleurs par sortir une autre flèche de son carquois et leva son bras au dessus de l'homme, prêt à abattre dans son cou. Il ne pourrait plus résister bien longtemps ; il devait agir très vite s'il voulait mettre K.O. ce foutu mortel.

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'Attaque - Elfe' :

Il avait touché. Sa lance avait touché.
Avec un hurlement de douleur, l’elfe reçut la lance dans l’abdomen. Le temps d’Excelsior s’arrêta.
Il avait beau être un grand héros, peut-être même le plus grand de sa génération, jamais il n’avait blessé quelqu’un à ce point. Jamais il n’avait déchiré la chair, jamais il n’avait percé les organes, jamais il n’avait tué. Le temps s’arrêtait.
Il s’arrêtait sur la blessure, d’où coulaient des rivières d’un sang figé. Il s’arrêtait sur le visage de l’elfe, avec une expression de stupeur figé.
Il s’arrêtait sur Excelsior, que la peur de la mort venait d’envahir. La peur de la mort.
Mais pas de la sienne.
Le temps reprit son cours lorsque, avec un second cri, l’elfe retira la lance et la jeta aussi loin qu’il put. Le sang coulait. Le sang coulait beaucoup trop.
Le héros, quoi qu’il fasse, ne pouvait se relever. La peur est le plus grand des paralysants. Elle le bloquait au seul mieux que n’importe quel poison. Mieux que n’importe quelle blessure. Mieux que tout ce qui pouvait exister de sombre.
Puis tout s’accéléra. Le blessé se jeta sur lui, avec toute la rage qu’avait décuplée sa blessure, et se démena pour remuer la flèche, encore plantée dans les côtes d’Excelsior. Tout ne fut plus que douleur, les images se floutèrent et l’obscurité commença à envahir son champ de vision alors qu’un air de démon se peignait sur le visage de son adversaire.
Il vit l’elfe prendre une flèche dans son carquois et lever le bras en direction de sa gorge. Il n’aurait pas le temps d’esquiver.
Dans un ultime sursaut, il se démena, et juste avant que la flèche ne l’atteigne, se trémoussa suffisamment pour que la pointe ne se plante dans son épaule, suffisamment profondément pour entraver les mouvements de son bras mais assez peu pour que la blessure ne lui soit pas fatale. Il espérait simplement qu’il n’en tirerait pas de séquelle.
C’était à lui d’agir. Il ne voulait tuer personne.
Dans un élan d’énergie qui lui semblait être celui de la dernière volonté, il repoussa l’elfe, qui tomba à la renverse sur le sol, et, sans prendre le temps de se relever vraiment, prit son élan et tenta un coup de poing au visage le plus fort qu’il put.
Il devait calmer cet enragé, ou l’un d’eux allait mourir. Que ce soit l’un ou l’autre, l’issue ne pouvait être heureuse.
Et les héros ne connaissaient que les fins heureuses, non ?

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'Attaque - Humain' :

Fin du combat Edrahil - Excelsior


Excelsior l'emporte
Il gagne 35 points d'expérience et 25 pièces d'or
Edrahil est battu
Il gagne 25 points d'expérience et 15 pièces d'or

Alors que sa folie l'emportait et qu'il plantait sa seconde flèche dans l'épaule de l'homme, Edrahil fut repoussé sur le dos par son assaillant. Un vertige le saisit tandis qu'il roulait en arrière, le forçant à fermer les yeux pendant quelques instants. Il avait mal et il avait perdu trop de sang. Il était parfaitement incapable de se battre plus longtemps. Pourtant, il aurait aimé faire la peau à ce mortel et l'étrangler avec la corde de son arc jusqu'à ce qu'il expire son dernier souffle. Mais son adversaire, contrairement à lui, possédait suffisamment de vitalité pour lui asséner un dernier coup. Le poing fermé de l'inconnu percuta donc son visage et lui fit perdre connaissance pour de bon.

Il sentit un léger fourmillement dans tout son corps et sa conscience s'éteignit. Tout était noir, tout était silencieux. Il n'était plus qu'un corps immobile dont les seuls mouvements perceptibles étaient ceux d'une faible respiration ainsi que du sang s'échappant encore de sa plaie. Même sa colère et son orgueil blessé ne pouvaient plus se manifester pour le moment.

Excelsior tomba à genoux. Percé d’une flèche dans les côtes et d’une autre dans l’épaule gauche, il était vivant. Et malgré le risque d’infection, il sentait que ses jours n’étaient pas actuellement en danger. Il sentait qu’il survivrait. Physiquement, du moins.
Etait-ce ça, un vrai combat? Un évènement aboutissant forcément sur la douleur de l’un ou le malheur de l’autre ?
Epuisé, le jeune homme trouva tout de même la force de vérifier l’état de son adversaire. Vivant.
Pour le moment.
« Et les héros ne connaissaient que les fins heureuses, non ? »
Il était fatigué. Vide de toute énergie. Il ne semblait presque plus réellement vivant.
Mais il marchait.
Il marchait, encore et encore, l’elfe dans les bras, lui qui pourtant était d’une nature si fébrile. La vie de quelqu’un était en jeu. Il lui semblait avoir marché pendant des heures, des jours ou même des semaines. La notion du temps lui était étrangère.
Il ne se souvenait pas d’être arrivé dans un petit village, constitué d’à peine quelques huttes. Il ne se souvenait pas de s’être évanoui à peine à l’entrée non plus, d’ailleurs. Et il ne pouvait donc pas se souvenir de s’être fait soigné par les habitants de ce village, d’une grande gentillesse et douceur, malgré leur retrait de la civilisation.
Lorsqu’il se réveilla sur un lit de pauvre facture, il ne se souvenait rien de tout ça. Il se souvenait simplement que la vie de cet elfe lui importait. Il ne voulait pas de mort.
Il se levait de sa paillasse, doucement, la peur au ventre.
Excelsior, le grand héros, avait peur d’avoir tué quelqu’un.

La lumière perçait doucement par la fenêtre d'une modeste chaumière, étirant ses rayons sur le corps de l'elfe brun étendu dans un lit. C'est l'aveuglant appel du soleil qui lui fit d'ailleurs entrouvrir les yeux et quitter le sommeil. Combien de temps avait-il dormi ? Il n'aurait su le dire. Il ne se rappelait même pas des événements récents. Lentement, il se tourna sur le côté afin de chercher un appui pour se lever, mais une douleur brûlante dans l'abdomen lui fit reprendre sa position initiale. Alors il n'avait pas rêvé ? Il s'était bien battu dans la forêt, et il avait bien été blessé par une lance. Mais où était-il dans ce cas ? A qui appartenait la hutte dans laquelle il se trouvait actuellement ? Faisant fit de la sensation tiraillante dans son ventre, il se redressa dans le lit et se leva tant bien que mal pour rejoindre l'unique fenêtre de la bâtisse.

Un village elfique, cela ne faisait aucun doute. Mais pourquoi l'aurait-on ramené ici ? Et qui l'aurait trouvé à temps au milieu de la clairière ? Son regard s'endurcit brusquement à la simple idée que son adversaire ait pu le mener jusqu'ici pour qu'il se fasse soigner. Il ne voulait pas de cette pitié, il ne voulait pas être sauvé par celui qui aurait dû lui ôter la vie. Plutôt mourir à même le sol de cette forêt ! Plutôt voir son propre sang s'écouler jusqu'à la dernière goutte ! Son poing se serra fermement et il frappa contre le mur, à quelques centimètres du contour de la fenêtre. Quelle humiliation !

Edrahil s'éloigna de la fenêtre pour reprendre un peu ses esprits avant de décider de sortir de l'habitation pour chercher quelqu'un pouvant lui apporter des réponses. Il enfila sa tunique et sa cape pliés proprement à côté du lit où il avait passé son petit coma, jetant un dernier coup d'oeil au large bandage qui entourait son abdomen. Cet enfoiré de mortel avait dû lui laisser une sacrée marque... Il le retrouverait et le lui ferait payer, une fois qu'il aurait reprit des forces.

L'humain n'avait plus qu'à espérer ne pas croiser sa route de sitôt. L'elfe grimaça à cette pensée et se dirigea vers l'extérieur de la chaumière, une désagréable sensation l'envahissant à peine eut-il franchis le seuil de la porte. Il ne devrait même pas être ici. Et encore, il avait de la chance qu'on ne l'ait pas reconduit à Endorial ! Il lui fallait partir d'ici au plus vite. Tant pis pour les informations, tant pis pour les questions qu'il voulait poser. Il lui fallait quitter cet endroit maudit et partir du royaume des elfes avant qu'on ne le repère. Il fit volte face pour aller chercher son arc et son carquois à côté du lit, aussi rapidement que sa blessure le lui permettait, puis il quitta la demeure d'un pas léger. Il allait devoir traverser le village sans être repéré et regagner l'abri de la forêt dans les plus brefs délais. Un coup d'oeil à droite, un coup d'oeil à gauche.

Le village était rustique. Réellement, rustique.
La petite dizaine de huttes abritait des elfes champêtres, qui, le cœur sur la main, n’avaient pas hésité à les aider et à les accueillir. Excelsior, selon ses hôtes, dormait ici depuis quatre jours, et était déjà pratiquement remis sur pied. Son incroyable constitution, car il en fallait bien lui reconnaître ça, lui avait permis de recouvrer de ses blessures plutôt rapidement, même s’il souffrait encore quelque peu. Il était heureux cependant qu’elles n’entravent plus ses mouvements.
Les huttes étaient organisées autour d’une petite place centrale sur laquelle se dressait un grand chêne, symbole massif de la force de la forêt. Alors qu’il en faisait le tour, passant dans chaque maison pour remercier un à un les membres du village qui l’avait sauvé, nourrit et hébergé, il aperçut l’elfe qu’il avait tabassé puis sauvé sortir d’une hutte.
Pensant avoir la chance de profiter du fait qu’il soit ébloui par le soleil, il bondit, roula et sa cacha derrière le chêne, dont la circonférence aurait pu en cacher plusieurs autres de son gabarit.
Pourvu qu’il ne soit pas rancunier…

Tout était silencieux autour de lui, c'était l'idéal pour s'enfuir sans demander son reste. Néanmoins, il figea son regard sur le village un peu trop longtemps et ce qu'il vit ne lui plut guère. Sa némesis venait de passer dans son champs de vision et de se jeter derrière l'immense arbre qui s'imposait au milieu de la place. Petit fumier. Petit enfoiré. Comme s'il pouvait s'en tirer comme ça alors qu'il était encore dans les mêmes parages que lui !

« Toi ! »

Héla-t-il avec férocité tandis qu'il pressait le pas vers l'immense chêne qui trônait au centre du village. Ses sourcils étaient froncés, son regard était aussi noir qu'empli de colère. Il allait achever sa misérable vie sur le champs. Pour avoir osé le défaire, pour avoir osé le blesser grièvement, pour avoir osé l'humilier en lui sauvant la vie. Surtout pour ce dernier point en fait. Il contourna le tronc d'une démarche assurée et se retrouva face à l'humain. Sans laisser une seconde s'écouler, il l'attrapa au col et le plaqua contre l'immense roi des forêt, une grimace venant alors soudainement déformer ses traits. Il dût se concentrer au maximum pour ne pas le relâcher tant le mouvement bref qu'il venait d'effectuer tirait sur sa plaie à peine cicatrisée.

« Espèce de... »

Espèce de rien du tout. En réalité, Edrahil n'avait aucune idée de la façon dont il pouvait terminer sa phrase. Pourquoi est-ce qu'il ne le frappait tout simplement pas au visage ? Pourquoi ne le tuait-il pas comme il l'avait prévu à la base ? Sa colère fit trembler ses muscles et relâcher l'inconnu qu'il bloquait contre l'arbre. Ses yeux s'écarquillèrent de haine. Putain de merde...

« Toi ! »

Trop tard. Il était apparemment rancunier.
N’ayant pas le temps de réfléchir, il se fit plaquer contre le chêne, sans pouvoir résister. Excelsior aurait pensé que l’acte de sauver la vie de l’elfe aurait lavé leur différend. Pour l’elfe, il n’en était visiblement rien.

« Espèce de... »

L’elfe ne termina pas sa phrase. Peut-être se rendait-il compte qu’il ne pouvait réellement en vouloir à Excelsior, qui, s’il l’avait certes battu, l’avait ensuite sauvé. Peut-être n’avait-il tout simplement plus la force de continuer. Toujours est-il qu’il le relâcha, malgré la colère encore visible sur son visage.
Prenant l’air le plus sérieux qu’il put, fronçant les sourcils à outrance et plantant son regard dans celui de son interlocuteur, il déclara :

« Si je t’ai sauvé dans la clairière, c’est parce que tu n’avais aucune chance de survivre sans moi. Si je t’ai sauvé, c’est parce que je n’aime pas que les gens meurent. Si je t’ai sauvé, c’est parce que je suis un héros, jeune elfe ».

Il était le plus sérieux du monde. Excelsior n’espérait qu’une chose.
L’arrêt des animosités qui n’avaient pas lieu d’être.
Il attendit avec appréhension une réponse qu’il redoutait.

L'inconnu prit un air bien plus sérieux qui poussa une pointe d'intrigue dans l'esprit d'Edrahil. Il soutint son regard, l'écoutant déblatérer sa complainte de héro. La colère s'embrasa dans ses yeux encore plus intensément durant quelques instants, avant qu'un ricanement sec ne franchisse la barrière de ses lèvres. Quel stupide raisonnement, quelle stupide façon de penser... L'elfe brun plissa les yeux et ancra d'avantage son regard dans le sien, cessant de rire mais conservant un semi-rictus prétentieux.

« Quelle ridicule explication... Alors c'est ça, ta façon de faire ? Estropier tes adversaire et les sauver à temps pour récupérer les louanges ? Tu espères donc de moi un remerciement pour une si pitoyable action ? »

Edrahil recommença à rire doucement de façon amère. Les héros, il les haissait profondément. Ceux qui font le bien, ceux qui se pensent lavés de tous péchés. Tout le monde porte sa croix et ceux dont on chante les louanges sont bien souvent ceux qui ont le plus de sang sur les mains. En quoi ce mortel serait-il plus héroique que lui-même dans ce cas ? Parce qu'il pense servir des intérêts glorieux ? Parce que sa façon d'agir est bien vue par les autres ? Pitoyable ! Ridicule ! Il n'y a pas de héros, il n'y a pas de gentils.

Excelsior, malgré son infinie noblesse de cœur et son ouverture d’esprit, ne put réprimer sa colère.

« J’estropie mes adversaires ? Moi, je n’agresse pas les gens endormis d’une flèche au dessus du crâne ! Moi, je n’encoche pas de flèche lorsque quelqu’un vient me parler ! Et moi, je chéris suffisamment la vie pour reconnaître lorsque qu’un sauveur vaut la peine d’être remercié ! »

Il attendit quelques secondes que son souffle redevienne calme. Il s’était emporté.

« Cette rancœur envers moi n’a aucune raison d’exister si ce n’est de la jalousie parce que j’ai gagné le combat. N’appréciant pas plus que de raison la mort, j’ai tout de même cherché à te sauver. »

Il marqua une nouvelle pause, peut-être autant pour mesurer ses paroles que pour prendre le courage de les dire.

« Peut-être n’aurais-je rien du faire, je me le demande... »

Pour la première fois depuis le début de son aventure, Excelsior se sentait triste, d’une tristesse aussi profonde que l’abîme créé dans son cœur par la peur de la mort de son adversaire, que cet abîme qui ne s’était pas refermé depuis et qui s’envenimait encore par la discussion présente. Quelque chose avait changé en lui.
Il était toujours un héros.
Mais ce monde avait-il réellement besoin de héros ?