Fouler à nouveau les longs couloirs tortueux de l’institut m’avait rendu un peu nostalgique. Ça faisait longtemps que je n’y étais pas retourné. Bien que n’ayant jamais été une élève assidue… Mais ce lieu avait toujours été plus qu’une école. C’était aussi une guilde où les plus puissants magiciens de Dùralas se rencontraient pour échanger leur savoir et les derniers potins politiques en vogue.
Et oui, être sensible à la Source ouvrait bien des portes et permettait de laisser traîner ses oreilles dans les plus intimes réunions royales.

Mais ce n’était pas pour ça que j’avais accompagné Eyara jusqu’à l’édifice arboricole. À demi-dissimuler dans la végétation de Sylfaen, l’école pouvait facilement passer inaperçu d’ordinaire. Mais l’euphorie de la nouvelle saison et l’arrivée de nombreuses nouvelles têtes, aussi bien venant étudier et découvrir la magie, qu’enseigner, la rendait beaucoup moins discrète que le reste de l’année.
Tout en laissant la jeune maman s’imprégner des lieux et s’inscrire, j’étais tombé sur Urua.

« Urua ! Quelle surprise ! Mais qu’est-ce que tu fais là ? Avais-je demandé au lowen, contente de le retrouver. Urua, repris-je. Je te présente Eyara, et ses filles, qui vient de s’inscrire à l’institut et voici Jack, heu… Mon compagnon… » J’avais murmuré sur les derniers mots, si bien qu’un humain ne les aurait certainement pas entendus. Urua avait toujours été très protecteur envers moi, différemment d’Azriel, évidemment, mais j’ignorais comment le lowen pourrait réagir à cette annonce. Et puis c’était aussi tout nouveau pour moi.

Et de fil en aiguille, au fil des conversations, nous voici en chemin pour accomplir un des devoirs pratiques préféré de l’école : prélever des ressources magiques sur des créatures magiques.
Une tactique fine venant du corps professoral. D’un côté ils faisaient croire aux nouvelles recrues qu’ils allaient apprendre des choses sur la magie, et d’un autre ils renflouaient leurs réserves d’ingrédients magiques pour leurs sortilèges et autres concoctions hasardeuses.
Mais tout savoir était bon à prendre, et quitte à rencontrer des créatures dangereuses au fil de ses voyages, autant que ce soit fait dans le cadre scolaire d’une mission bien encadrée pour Eyara. Je ne voulais pas qu’elle risque de se blesser, elle était maman après tout… Et puis j’avais déjà eu assez peur pour elle lorsque nous étions partis protéger ces villages des goules. Et Urua plus Jack à nos côtés, la mission serait vite accompli, et sans encombre.

…

« On devrait pas tarder à arriver dans la zone de repos des Golems de Cristal » Annonçais-je, en pataugeant dans le sable fin.

Nos pas nous menèrent bien vite vers un désert rocheux, où nos pieds pouvaient marcher sur un sol dur. D’immenses rochers aux teintes variables nous entouraient et la chaleur du désert semblait stagner dans cet étouffant dédale ensoleillé.

Le sable rouge semblait s’étendre à perte de vue, doucement grignoté par une mer calme d’un côté. De l’autre, les rochers poussaient telle une végétation luxuriante. Difficile de savoir si un golem de cristal se cachait parmi la pierre ocre qui parsemait le terrain tout en relief et dénivelé.

« Les golems de cristaux sont imprégnés de magie terrestre. C’est leur cœur qu’il nous faut, si ça répond à ta question. C’est un noyau brûlant, une Source de magie très puissante qu’il faut manipuler avec soin. » Expliquais-je à mon amant, autant qu’à Eyara à qui je fis un grand sourire. Sa semi-transformation lui donnait un petit côté vraiment adorable. Et peut-être Urua, j’ignorais s’il connaissait déjà ces créatures. Surement…

Mais il ne m’écoutait pas vraiment parler. Il s'était immobilisé, semblant réfléchir avant de grogner carrément en fusilla Jack du regard. Il avait sûrement tiqué sur le surnom qu’il me donnait…

« Urua… Arrête-ça tu veux ? C’est clairement pas le moment. » Grondais-je en ponctuant ma phrase par un grognement canin tout en surveillant les alentours. Légèrement mise en colère. On était en plein milieu du territoire de créature invisible mais pourtant bien présentes. De plus, je me demandais bien qu’elle mouche l’avait piqué.

« Et puis c’est pas tes affaires ! » Couinais-je en lui faisant face, montrant les crocs. Pour une fois, est-ce que quelqu’un ne pouvait pas être content pour moi ? Pour nous ? J’allais ouvrir une nouvelle fois la bouche, mais un léger bruit d’éboulis attira l’attention de mon ouïe naturellement fine.

Un autre, plus fort, fut suivit de craquement rocailleux, d’un tremblement de terre puis d’un grognement caverneux. Nos proies commençaient enfin à se montrer !